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Autres poésies

Plus dur :

Du temps des Grecs…
Poésie du 17ème siècle

Du temps des grecs, deux sœurs disaient avoir
Aussi beau cul que fille de leur sorte ;
La question ne fut que de savoir
Quelle des deux dessus l’autre l’emporte
Dur en juger un expert étant pris,
A la moins jeune il accorde le prix,
Puis l’épousant, lui fait don de son âme ;
A son exemple, un sien frère est épris
De la cadette, et la prend pour sa femme ;
Tant fut entre eux, à la fin, procédé,
Que par les sœurs un temple fut fondé,
Dessous le nom de Vénus belle-fesse,
Je ne sais pas à quelle intention ;
Mais c’eût été le temple de la Grèce
Pour qui j’eusse eu plus de dévotion.

Jean De La Fontaine (1621 – 1695), fable,

Conte tiré d’Athénée

 

Encore plus dur :

L’Épouseur de famille

L’épouseur de famille
          Fuit la fille
Qui n’a pour dot qu’un cu
          Sans écu.
Aussi, quoique jolie,
          Azélie
Se trouve vierge encor
          Faute d’or.
Le désir la picote
          Sous sa cotte,
Et souvent elle doit
          Mettre un doigt
Qui longtemps y repose
          Sur sa rose.
Le dard raide et fumant
          D’un amant
Ferait mieux son affaire,
          Mais que faire
Quand on est seule au lit
          Et qu’on lit
Un roman érotique
          Spermatique,
Qui fait rentrer le bras
          Sous les draps ?
La main partout lutine,
          Libertine,
Agace le bouton
          Du téton
Qui, sentant la caresse
          Se redresse,
Passe au ventre poli
          Sans un pli,
Tâte les fesses, rondes
          Mappemondes,
Entr’ouvre les poils longs,
          Bruns ou blonds
Et glisse triomphante
           Dans la fente
Où, sous le capuchon
          Folichon,
Le clitoris s’abrite,
          Rose ermite.
L’index frotte d’abord
          Sur le bord
La coquille rosée
          Arrosée
Du liquide élixir
          Du désir ;
Cherche le point sensible
          De la cible,
Et trouvant le ressort
          Bandé fort,
Fait jaillir Aphrodite
          Interdite
D’avoir joué ce tour
          À l’amour.
D’autres fois, plus lubrique,
          Elle applique
En long son traversin
          Sur son sein ;
Dans ses cuisses l’enferme,
           Fort et ferme,
L’étreint comme un amant
          Puisamment,
Lève les reins et frotte
          À sa motte
Le molasse phallus
          Tant et plus.
Ce sac de plume d’oie
          Qui se ploie,
Représente assez mal
          L’idéal.
Pourtant la pose est digne
          Du beau cygne
Qui, chez les Grecs, banda
          Pour Léda.
Hélas ! Sur la mortelle
          Aucune aile
Des cieux en frémissant
          Ne descend.
Aucun dieu de l’Olympe
          Ne la grimpe :
Les dieux, chauds autrefois,
          Sont très froids.
La jouissance arrive,
          Convulsive,
Tachant d’un jet subtil
          Le courtil.
Dans la petite coupe
          Une soupe,
Où manque le bouillon
          De couillon,
Par Vénus attrapée
          Est trempée ;
Et l’amour autre part
          Met son dard !

          Moralité

Ma fille, sois ardente,
          Mais prudente,
Et sentant l’oreiller
          Se plier
Tout au bas de ton ventre
          Où rien n’entre
Ne va pas, pour jouir,
          Enfouir
Dans ta fleur élargie
          Ta bougie.
Bientôt le chandelier
          Tout entier
Suivrait, sans la bobèche
          Qui l’empêche.
Au fond du temple étroit
          Que le doigt
Respecte la membrane
          Diaphane,
Dont passera l’hymen
          L’examen.

 

Théophile Gautier (1811-1870)

Poésies libertines

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